Gérer les blocages et les conflits en formation

 

Silence et blocage de groupeQue faire si le groupe entier entame des blocages, et refuse de poursuivre l’activité pédagogique proposée ?

Les blocages en formation ne proviennent pas uniquement des personnalités respectives des participants.
La plupart des situations difficiles sont liées à une crainte profonde de certains participants, qui se traduit par un « refus d’obstacle », à savoir un blocage. La solution passe par la responsabilisation des stagiaires.


Conditions préalables à une situation de blocage total ?

Les stages de communication en groupe (animation de réunion, négociation collective, etc.) sont propices à l’émergence d’une crainte profonde chez les participants impliqués dans les jeux de rôles proposés par l’animateur.
Le blocage total survient parfois alors que le stage se déroulait normalement, le groupe s’étant montré de bonne volonté jusqu’à présent.
Néanmoins, le formateur avait constaté à l’ouverture du stage:

  • Soit que le groupe abordait la seconde moitié de la formation, qui constitue traditionnellement une période de fracture et d’oppositions dans le groupe,
  • Soit que les participants, pour la majorité d’entre eux, suivaient le stage par obligation, semblant peu impliqués par le sujet.

A un moment donné, certains stagiaires craignent « de ne pas y arriver » ou « de ne plus y arriver ».

Comment se traduit le blocage total de la part des participants ?

Le formateur vient d’annoncer un nouveau jeu de rôles portant, par exemple, sur l’animation d’une réunion.
Il a été convenu en début de stage que le rôle de l’animateur, sur les différentes simulations proposées, serait spontanément choisi par l’un des stagiaires désireux d’endosser ponctuellement ce statut.
Le premier jeu s’est déroulé de façon apparemment normale, et le formateur imagine que les suivants se déclineront à l’identique. Or, sur la seconde simulation, après que les consignes de jeu aient été communiquées, et au moment précis où le formateur demande : « Bien. Qui veut jouer le rôle de l’animateur de réunion sur la situation que je viens de vous présenter ? », un silence soudain tombe comme une chape de plomb.
Les stagiaires regardent tous fixement le formateur, attendant sa réaction. L’animateur ressent subitement une grande solitude.

Appliquer une technique précise en trois étapes.

S’agissant d’un problème qui implique à la fois le groupe, le formateur, et le contenu de la formation, il est impératif de le traiter pour pouvoir -peut être- poursuivre le stage.

Première étape : utiliser le silence pour obliger le groupe à s’exprimer.
Le formateur va tout d’abord demander aux stagiaires l’origine du problème : « Bon. Que se passe-t-il, subitement ? Je vous écoute. »
Il est très important qu’après cette question, l’animateur se taise absolument, et n’émette aucune supposition à la place des stagiaires.
Il se contentera, depuis son bureau derrière lequel il s’est confortablement assis -indiquant ainsi qu’il a tout son temps pour débattre de la situation- de planter son regard deux secondes dans celui de chacun des stagiaires, en suivant le tour de table, et ce sans prononcer aucun mot.
Cette attitude doit être volontaire et sans appel. Dès que le formateur a terminé son « tour de regard » en silence, il le reproduit, mais dans l’autre sens, deux secondes dans les yeux de chaque participant.
Le principe est le suivant : la nature ayant horreur du vide, il y aura obligatoirement un participant qui ne supportera pas cette situation pesante, et prendra la parole pour exprimer le malaise, la crainte.
Lorsqu’un lourd silence s’est installé, dans le cadre d’une situation de blocage, il faut savoir que le premier qui reprend la parole « a perdu ». En l’occurrence, il est préférable que ce ne soit pas le formateur.

Seconde étape : responsabiliser les stagiaires.
Après la prise de parole d’un premier stagiaire, les autres participants -par effet de groupe spontané- vont subitement compléter ses propos. Il est possible qu’ils suggèrent à l’animateur des solutions qu’il ne devra jamais accepter si elles remettent en cause les conditions de fonctionnement déjà posées, les fameuses règles du jeu. (dans le « R » de la CORDE de réunion).
Par exemple : « On pourrait tirer au sort le rôle de l’animateur de réunion », ou bien « Le formateur désigne celui qui jouera l’animateur de réunion », ou encore « On a qu’à faire autre chose ».
En effet, ces propositions visent uniquement -plus ou moins consciemment- à déplacer la prise de décision sur l’animateur, ce qui est à l’opposé de l’objectif pédagogique des formations de développement personnel.
Le formateur indiquera alors : « Vous avez soulevé une difficulté importante, qui est la vôtre. J’attends de vous une solution concrète. Si vous n’y parvenez pas, je serai tenu d’en référer au responsable administratif du stage, mais je suis persuadé que vous avez en vous les ressources pour surmonter cet obstacle ponctuel. »
La « menace » d’en référer est importante. Un groupe n’apprécie pas, en général, que ses difficultés dépassent le cadre du stage. Par ailleurs, le discours du formateur doit être conjugué au présent ou au futur simple, afin de conditionner positivement les stagiaires (technique bien connue en PNL : Programmation Neuro-Linguistique).

Troisième étape : laisser aux stagiaires un espace de liberté.
Les décisions librement consenties ont davantage de chance d’être suivies d’effets concrets.
De manière à ce que les participants puissent s’exprimer, le formateur les invitera à prendre un temps de discussion, même si la pause réglementaire vient de se dérouler.
Il exprimera son attente de cette façon : « Afin que vous puissiez discuter librement entre vous, je vous laisse dix minutes, et je m’absente de la salle. Lorsque je reviendrai, votre rapporteur de groupe indiquera la solution constructive que vous avez retenue pour que nous puissions poursuivre le jeu de rôles précédemment annoncé ».
Ensuite, le formateur se lève calmement, quitte la salle, et s’empresse de signaler cette difficulté au responsable administratif, de manière à ce que la situation ne lui soit pas préalablement exposée de façon erronée par l’un des stagiaires.
Ce cas de figure relève de la fonction de régulation du formateur, et engage sa responsabilité professionnelle.
A son retour en salle, le groupe proposera une solution, qui sera souvent exposée par celui qui avait rompu le silence lourd de la première étape (le participant gentil).
Le formateur félicitera les stagiaires pour leur saine décision, et acceptera cette solution sur le principe, quitte à l’aménager quelque peu en accord avec les stagiaires, ravis d’avoir évité un conflit général.
Très souvent, les stagiaires -qui, rappelons-le, ne faisaient bien souvent qu’exprimer une peur de l’échec- proposeront au formateur un travail accompagné : ils veulent bien jouer le rôle difficile de l’animateur de réunion, à condition que le formateur encadre la prestation et guide le jeu.

Tous droits réservés Dominique Dancoisne. Demandez l’autorisation de l’auteur avant toute reproduction sur Internet ou dans la presse traditionnelle.

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